Amélie NOTHOMB - Hygiène de l'assassin
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(par Annabelle)
Les deux parties de ce titre sont dévoilées assez tard dans l'histoire, bien que la première reste assez... bizarrement dite jusqu'au bout et après...
C'est l'histoire d'un prix Nobel de littérature du nom de Prétextat TACH - comme quoi, il l'a mérité, son prix - qui, après avoir passé toute sa carrière à refuser le moindre journaliste, décide - après que son médecin lui ait annoncé sa mort imminente - d'en recevoir cinq lors d'interviews en tête à tête.
Il se jouera méchamment de tous et ira jusqu'à les effrayer, les humilier et les briser complètement...
Pourtant, la cinquième - ouioui, une femme - lui tiendra tête. C'est là que commence véritablement le roman, qui est en fait une succession de répliques cassantes venant de chaque côté du dialogue.
Extrait :
« Son secrétaire, Ernest Gravelin, vivait quatre étages plus haut mais évitait autant que possible de le voir ; il lui téléphonait régulièrement et Tach ne manquait jamais de commencer la conversation par : « Désolé, mon cher Ernest, je ne suis pas encore mort. »
Aux journalistes sélectionnés, Gravelin répétait cependant combien le vieillard avait un bon fond [...] « Bien sûr, il nous terrorise tous, et moi le premier, mais je soutiens que ce masque agressif est une coquetterie : il aime jouer à l'obèse placide et cruel pour cacher une sensibilité à fleur de peau. » Ces propos ne rassurèrent pas les chroniqueurs qui, du reste, ne voulaient pas guérir d'une peur qu'on leur enviait : elle leur conférait une aura de correspondants de guerre. »
J'ai beaucoup aimé le personnage de Prétextat TACH. Une pourriture, il n'y a pas d'autre mot. Mais avec un esprit tellement tordu qu'il en devient génial !!! Un exemple : extrait avec le 3è journaliste :
« - Alors, la guerre a commencé ?
- Pas encore, monsieur Tach.
- Elle va commencer, quand même ?
- A vous entendre, on croirait que vous l'espérez.
- J'ai horreur des promesses non tenues. Une bonde de rigolos nous a promis une guerre, pour le 15 à minuit. Nous sommes le 16 et il ne s'est rien passé. On se fout de la gueule de qui ? Des milliards de téléspectateurs sont aux aguets.
- Êtes vous pour cette guerre, monsieur Tach ?
- Aimer la guerre ! Enorme ! Comment peut-on aimer la guerre ? Quelle question ridicule et inutile ! Vous en connaissez, vous, des gens qui aiment la guerre ? Pourquoi ne pas me demander si je mange du napalm au petit déjeuner, tant que vous y êtes ? [...]
- Bien. Donc vous n'aimez pas la guerre, mais vous voulez qu'elle ait lieu ?
- Dans l'état actuel des choses, c'est une nécessité. Tous ces petits cons de soldats bandent. Il faut leur donner l'occasion d'éjaculer, sinon ils auront des boutons et reviendront en pleurant chez leur maman. Décevoir les jeunes, c'est moche. »
Voilà un extrait des plus communicatifs, mais pas le meilleur... !
Sinon, j'ai personnellement trouvé quelques longueurs, et j'ajouterais même que l'ambiance bizarre et désagréable du livre est tellement...... communicative lorsqu'on lit que j'avoue avoir eu quelques difficultés à reprendre le livre par moments... me disant "brrr..... je vais encore être de mauvais poil..."
Finalement, la fin est aussi tordue que l'auteur - celui du et celui dans le livre - mais une bonne fin néanmoins.
-> Une fois le livre fini, cependant, et quelques années après encore, j'en garde néanmoins un excellent souvenir : étant fan des dialogues aux piques cinglantes, c'est une de mes références en la matière !
(édité en Livre de Poche)